16 mm : un argentique terrassé par le numérique

 

La caméra Bolex H16 est d’abord une œuvre d’art, une magnifique pièce d’horlogerie suisse. C’est ce qui incite aujourd’hui ses possesseurs à la conserver, comme un bibelot. Hélas, la pellicule devient difficile à trouver, ce qui justifie des prix prohibitifs, et les labos de développement ont déserté le continent. Voilà un argentique que le numérique aura éradiqué en une dizaine d’années, en imposant le standard d'une qualité optique croissante, d'une légèreté d’emploi qui met la prise de vue à la portée de tous, d'un son en constante amélioration et de prix de plus en plus doux. Aujourd'hui, le 16 mm ne subsiste plus que dans le milieu professionnel, mais pour combien de temps ?

On ne peut pas éviter de se demander si la photo argentique ne suivra pas le même chemin, à moyen terme. D'autant qu'il faut souligner l'intérêt de pouvoir désormais, grâce au numérique, étendre à la couleur le contrôle de toute la chaîne de production...

J'ai utilisé ce matériel de cinéma pendant plusieurs années, aux alentours de 1975. Une  parenthèse  agréable dans mon parcours photo. Et un dur apprentissage de la complexité : lourdeur de l'équipement, absence d'automatismes, rigueur indispensable du geste, souci d'épargner la pellicule m'ont laissé des réflexes utiles. Les appareils photo actuels restituent, en vidéo mais aussi en photo, les plaisirs de cette pratique en voie de disparition.

Les spécialistes de la photo méprisent généralement les possibilités de vidéo HD qui leur sont offertes, et il est exact que les deux activités sont peu compatibles. Mais il est sûrement possible, quand on a goûté à la vraie image qui bouge, de réussir le dédoublement de personnalité nécessaire à l'exercice alternatif de l'une et l'autre pratique.