Il reste cinq Français détenus dans le monde
Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier, les deux journalistes de France 2 détenus pendant un an et demi par les Talibans en Afghanistan, ont enfin été libérés. Qui ne s'en réjouirait ? Sûrement pas moi, qui ai labouré le champ journalistique, par tous les temps, pendant quarante ans. Bravo, les gars ! Bon retour au pays.
Mais cette joie serait confortable et entière si on ne comptait pas encore neuf otages français, aux mains de terroristes islamistes ou de simples bandits de grands chemins. Neuf anonymes, dont certains sont détenus par des séides d'El Kaïda, ce qui signifie que leur vie est gravement menacée. Huit hommes et une femme, qui n'ont pas la chance d'être journalistes de télévision et dont les photos ne se sont jamais étalées, géantes, sur les façades des mairies de France.
Il me semble que, par égard pour eux et leurs familles dans l'angoisse, la fête aurait pu être un peu plus discrète. Champagne, oui, peut-être, mais dans un salon privé, à l'abri des caméras. Embrassades et cris de joie, sans doute, mais dans l'intimité familiale, amicale et confraternelle. Pas aux yeux de toute la France, pendant plusieurs dizaines de minutes prélevées sur les journaux télévisés de toutes les chaînes, alors que l'actualité mondiale reste riche d'événements au moins aussi importants. Mercredi soir, lorsque la nouvelle a été connue, on a attendu vingt-deux minutes, dans le journal de TF 1, pour rappeler qu'il restait des otages en détention. Et on a accordé à ce rappel une poignée de secondes. Au 13 Heures de France 2, aujourd'hui, on ne s'est pas davantage étendu sur le sujet.
Les journalistes en mission de guerre connaissent les risques qu'ils prennent. C'est là la noblesse de leur métier. Or il n'y a pas de noblesse dans le tapage, surtout médiatique, l'un des vices de notre époque. Les vieux journaleux, qui s'effaçaient humblement derrière l'information, le savent bien. Je suis sûr que Ghesquière et Taponier le savent aussi et n'en peuvent mais. Le policier anonyme blessé en service, le pompier sans visage qui périt dans un incendie, ne valent pas moins qu'eux, et on leur réserve la portion congrue de l'information. De même, les autres otages français méritent tout autant qu'on se mobilise pour eux. Or on ne peut pas dire que l'élan médiatique soit le même, qu'il ait été efficace ou non.
Mise à jour du 14 novembre 2011. - Trois otages détenus par El Kaida au Yemen ont été libérés, grâce à l'intercession du sultan d'Oman. Officiellement, et comme d'habitude, le gouvernement français ne paie jamais de rançon... Il reste cinq otages en détention.